IA : l’école 42 (Xavier Niel) adapte sa formation sans renier ses fondamentaux

Alors que l’IA bouleverse les métiers du code, l’école 42 affine sa pédagogie et prépare ses étudiants à relever les nouveaux défis techniques, sans céder à l’effet de mode.
Plus de dix ans après sa création, l’école 42, fondée par Xavier Niel réaffirme sa pertinence dans un paysage technologique en pleine mutation. Ce jeudi, les étudiants retrouvent le NOC 42, le bâtiment historique entièrement rénové de 9 000 m² situé dans le 17ᵉ arrondissement de Paris, symbole de la résilience et de la modernisation d’une école qui forme aujourd’hui plus de 21 000 étudiants dans 56 campus à travers 32 pays.
Mais si les murs changent, l’enjeu de fond est ailleurs : comment continuer à former des développeurs alors que l’intelligence artificielle transforme radicalement le métier ?Fondée sur l’apprentissage pair-à-pair, l’autoévaluation et la méritocratie, l’école 42 n’a jamais reposé sur l’apprentissage de langages à la mode. « On n’apprend pas une technologie, mais à réfléchir », rappelle Sophie Vigier, directrice générale de l’école. Le choix de faire coder les étudiants en C dès la fameuse « piscine » – une immersion intensive de 26 jours – prend alors tout son sens dans cette logique de formation à l’abstraction, à la résilience et à la résolution de problèmes complexes.
Cette approche, selon elle, prend toute sa valeur à l’heure où l’IA menace d’automatiser les tâches répétitives du développement logiciel : « L’avènement des agents IA va remplacer les tâches simples ou celles effectuées par les stagiaires. Nos étudiants devront aller plus loin dans les compétences qu’ils développent. »
De nouvelles spécialisations pour rester employables
Consciente des bouleversements à venir sur le marché de l’emploi, l’école a depuis plusieurs années ouvert des parcours de spécialisation, dont l’intelligence artificielle, la cybersécurité, le cloud ou encore le jeu vidéo. Après un tronc commun de 14 à 15 mois, les étudiants peuvent approfondir leurs compétences dans ces domaines stratégiques, où la compréhension fine des algorithmes, des données et de l’infrastructure reste essentielle malgré les progrès de l’IA générative.
Mais à la différence de formations axées sur l’utilisation directe des IA génératives (comme l’écriture de prompts), 42 met l’accent sur la maîtrise des fondements techniques, notamment en algorithmie, machine learning et deep learning. « On n’apprend pas à consommer l’IA, on apprend à la comprendre, à la construire, à la maîtriser », insiste Sophie Vigier.
La directrice générale ne cache pas que certains débouchés deviennent plus incertains, notamment les postes les plus accessibles dans le développement web. Pourtant, elle reste confiante sur l’employabilité des étudiants, grâce à une formation qui ne repose pas sur des technologies figées mais sur des compétences transversales : autonomie, adaptabilité, capacité à apprendre vite.
Une approche éthique et internationale de l’IA
Le réseau 42 entend également jouer un rôle dans le débat sur l’IA éthique. Des projets autour de la responsabilité algorithmique, de la gestion des biais ou de l’inclusivité technologique sont en cours dans certains campus. La diversité géographique du réseau permet d’adapter les priorités selon les pays : très avancés sur l’IA aux Émirats arabes unis, plus en retrait en Malaisie, les campus bénéficient chacun d’une certaine autonomie pédagogique.
Et l’expansion continue : après une phase de consolidation, 42 vise 200 campus d’ici 2030, avec un pic attendu à partir de 2027 grâce à une nouvelle infrastructure informatique. Alors que certaines grandes entreprises tech revoient à la baisse leurs besoins en développeurs juniors, l’école 42 fait le pari inverse : non pas résister à l’IA, mais former ceux qui sauront dialoguer avec elle, l’intégrer, l’encadrer. Dans ce contexte, sa pédagogie atypique et son ouverture à des profils sans diplôme mais à fort potentiel prennent une résonance nouvelle. « Nous formons des profils agiles, capables de s’adapter à n’importe quel problème, dans un monde où les repères technologiques changent en permanence », conclut Sophie Vigier.
Source : Le Figaro